Pour son exposition The Relative Size of Things and the Vertigo of the Infinite aux Champs Libres à l’invitation de 40mcube, Benoît-Marie Moriceau intervient dans le bâtiment, avec une installation présentée dans la salle Anita Conti, et dans la ville, avec une intervention à l’échelle de l’espace public visible depuis la bibliothèque.

Pour cette intervention, Benoît-Marie Moriceau a pris le parti de surdéterminer le point de vue en agissant directement à l’intérieur du paysage urbain. S’il n’est pas question ici d’un panorama d’exception comme la vue imprenable sur un massif montagneux, sur une mégalopole ou sur la mer, il s’agit malgré tout de mettre à profit un regard élargi sur la cité. Intervenir à l’échelle d’une étendue urbaine, c’est éprouver des capacités et des limites qui sont celles de notre vision. C’est aussi se confronter aux règles qui régissent l’occupation de l’espace public ou privé et définir une stratégie d’infiltration qui produit du sens poétique.

Le projet consiste à installer pour une durée de six mois des sources lumineuses perceptibles en plein jour. Les dispositifs génèrent une suite de scintillements à la fois intenses et furtifs qui créent un réseau lumineux dynamique et aléatoire dans le tissu urbain. La lumière est visible mais d’une manière si fugace qu’elle met à l’épreuve la persistance rétinienne de l’observateur. L’artiste applique à cette intervention lumineuse la logique constructive et séquencée de la musique minimale, confiant au musicien Pierre Lucas la charge d’établir une composition rendue silencieuse qui sert de base au déclenchement des flashs lumineux. Il s’est appuyé pour cela sur des principes de partitions visuelles comme celle de l’ Atlas Eclipticalis de John Cage ou à des phénomènes naturels comme le mode de communication des lucioles. Une fréquence est intégrée à chaque dispositif et son déclenchement est programmé aux heures d’ouverture de la bibliothèque. La fréquence se joue en boucle et c’est l’effet du décalage temporel qui fait progressivement varier la composition de l’ensemble générant un effet aléatoire.

Plutôt que de définir l’emplacement des sources lumineuses en fonction de points d’intérêts dans la ville ou d’une composition visuelle déterminée de façon purement arbitraire, l’artiste a choisi de s’appuyer sur une situation circonstancielle et un principe de hasard. Ainsi, un appel à participation a été lancé via les réseaux sociaux et par la diffusion d’une annonce dans la presse locale. Les habitants qui aperçoivent la bibliothèque depuis chez eux ont été invités à se manifester. Dans un périmètre de 1500 mètres de distance, une vingtaine de sites ont ainsi été choisis pour installer les dispositifs qui constituent l’installation.

Depuis la bibliothèque des Champs Libres, le lecteur qui déambule dans les rayonnages ou celui dont le regard s’échappe distraitement de son livre, pourra discerner ce signal, un appel destiné à atteindre le regardeur dans son déplacement et peut-être même l’interrompre dans son activité tel un punctum. Ces ponctuations agissent sur l’espace public dont la perception relève autant d’un acte individuel que d’un ensemble de contributions accomplies de façon orchestrée et silencieuse…

Anne Langlois / Benoît-Marie Moriceau

Partenaires de l’exposition : Bauraum, Groupe Legendre, Lendroit Éditions, Model and Co, My Lucky Pixel, PanoramaRoad, PierroTechnics, Polyrepro, Smart Machines, Stergann, Teschner – Sturacci, Tolila + Gilliland, Urban Maquette

Partenaire média : Les Inrockuptibles.